Au bout de quelques semaines ou quelques mois le mariage était décidé. Le garçon se présentait avec son père chez le futur beau-père et tout était fait dans le plus grand protocole; pendant que les futurs mariés organisaient la noce, les pères discutaient de dote:
"Je donne à ma fille un trousseau, un lit, un chiffonnier, deux ou trois bêtes à cornes etc..."
Les grands préparatifs du mariage commençaient. On faisait des corvées pour piquer les courtepointes du trousseau. Les femmes les plus audacieuses risquaient de temps en temps une petite phrase dans leurs conversations pour préparer un peu la jeune fille ignorante à la vie nouvelle qui l'attendait. La future mariée rougissait en baissant les yeux, s'y piquait même les doigts, tellement le sujet la troublait.
Enfin le grand jour arrivait. Un grande filée de voitures prenait le chemin de l'église, et rendus sur les lieux les futurs mariés passaient au confessionnal. Et le prêtre donnait la consigne du temps. "Tu dois obéissance et soumission à ton mari; tu n'as pas le droit de lui refuser". Pour quelques jeunes filles, c'était refuser quoi?
Souvent la jeune fille sortait du confessionnal les larmes aux yeux, désemparée devant une telle réalité qu,elle ignorait jusqu'à ce moment.
Les noces duraient des semaines à visiter toute la parenté, à coucher ici et là, dans la famille sur des paillasses (matelas remplis de paille) fraîchement remplies pour les jeunes mariés.
Ainsi se passait le prélude à l'amour et à la vie à deux. On s'installait sur une petite terre bien à soi, avec les redevances annuelles, ou on allait demeurer chez les beaux-parents, dont la maison était encore remplie: d'aïeuls ou de frères et soeurs du marié. La jeune épouse prenait les conseils et coutumes de sa belle-mère, commençait à élever sa famille dans la soumission, le silence et le respect. À chaque jour, suffisaient ses peines et ses joies. C'était une bonne travaillante, ménagère; le beau-père se frottait les mains de contentement et disait à ses voisins: "Mon garçon, y é ben greillé d'femme, y va réussir!"
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