pique-nique, quoi! Ils iraient donc, ce matin, malgré le vent rageur, malgré la neige aveuglante, c'était écrit: ils avaient projeté cela la veille; ils iraient bien sûr, coûte que coûte, en dépit de tous les éléments conjurés! Ils iraient d'autant plus, baguette! que c'était, cette année, la première fois! Car, il faut le dire en toute justice, nos amis sont des braves entre les braves; en tout cas, ils ne sont pas des poules mouillées qui fuient devant les giboulées.

Bon, v'là les gars qui partent pour aller arracher des clams. Partons avec eux, l'excursion en vaut la peine; suivons-les là-bas, vers le large, dussions-nous, auretour, avoir l'estomac dans les talons! Ils partent toute une bande, dix ou douze, bien habillés et chaussés de bottes de caoutchouc, munis de bonnes mitaines, chacun portant sur l'épaule une pelle ronde, ainsi qu'une grande chaudière enfilée par l'anse, dans le manche de la pelle. De plus, chaque gars emporte un sac dans sa chaudière, pour mettre les clams.

Les arracheurs s'en vont en une double ligne - tel un peloton - sur la glace épaisse et ondulée, marchant dans les pas les uns des autres, le corps penché de côté à cause du vent qui les tient en flanc - un peu comme le voilier qui louvoie - et qui les fait parfois, rompre les rangs, sortir de leur course, comme ils disent sur l'eau, sous les poussées brutales de bourrasques plus violentes.

Cependant, les vaillants garçons poursuivent leur marche, ils vont de biais, le cap sur l'Île-aux-amours, ils s'en vont là-bas, à un gros demi-mille de terre, là où la grève - débarrassée de glace depuis la dernière grande mer - laisse voir, par temps, serein, des grosses roches isolées et sauvagement drapées de varech. Enfin! les voilà arrivés. La mer est basse, toute basse, c'est le temps; les garçons se dispersent sur la grève, pas loin les uns des autres, - ainsi qu'une volée de canards qui s'abat, - et, résolument, se mettre à piquer de la pelle.

Mais, cette pelle, il ne s'agit pas de l,enfoncer au hasard, n'importe où dans la grève; non, ce n'est pas ça; mais, si l'on veut avoir des clams, des vraies clams, il faut planter sa pelle là où, dans la surface durcie, - durcie par les innombrables marées au cours des âges, - se voient de p'tits trous ronds, de la grandeur d'un cinq cents, généralement rapprochés les uns des autres, groupés en constellations. Ce sont là, comme on dit, des niques de clams. Disons tout de suite que plus la