Minuit. Tout nous émerveillait, le petit Jésus dans la crèche, l'orgue et les chants. Mais, l'idée du réveillon était là.

La messe terminée, on reprenait le chemin du retour. Les grelots des montures résonnaient comme des clochettes dans la nuit froide, ce qui contribuait à rendre ces moments presque féérique.

Quelle satisfaction d'arriver à la maison, de se sentir à la chaleur après la messe de minuit. La table dressée du plus beau service de vaisselle nous éblouissait. Une odeur se dégageant des chaudrons sur le poële, nous donnait déjà l'idée d'un bon repas appétissant. On s'attablait, on mangeait et on festoyait à une heure avancée dans la nuit.

La mère couchait au fur et à mesure les enfants qui s'endormaient un peu partout, dans l'escalier et quelques fois sur le plancher.

Pour le souper, la parenté se rassemblait autour d'une table bien garnie, cipaille, ragoût de pattes de cochon, tourtières, boudin grillé, beignes et Jello multicolore garni d'une bonne crème fouettée.

Les tartes de toutes sortes faisaient honneur à la cuisinière. Ces repas et veillées se succédaient d'une famille à l'autre de Noël au Jour de l'An.

La veille du Jour de l'An, on pendait son bas, on couchait les enfants tôt pour être debout dès l'aube, le lendemain.

Les filles ainées de la famille passaient une bonne partie de la nuit debout à surveiller la cuisson du cipaille et préparer la table pour le dîner du lendemain. On s'occupait également d'emballer les étrennes qui ne s'échangeaient qu'au Jour de l'An. Elles ne dormaient que quelques heures sur une robe de cariole jetée près du poêle à bois qui ronronnait toute la nuit.

Vers cinq ou six heures le matin, on passait par les chambres avec une clochette, comme dans un couvent, pour réveiller toute la maisonnée. À moitié endormis, les enfants faisaient cercle autour des parents et l'ainé demandait au père sa bénédiction. D'une vois solennelle et dans un grand signe de croix au-dessus de ses enfants agenouillés, le père ému bénissait sa progéniture.